Le français est un peu arabe

Qu’ont en commun les mots almanach, camelote, chouïa, jarre, razzia, matraque, jasmin, zéro, élixir, sorbet, moka et j’en passe? Ils sont d’origine arabe et ne représentent qu’une partie infinitésimale d’un héritage séculaire.

Outre les noms des épices (cumin, estragon ou safran) qui parfument nos plats et des fruits doux ou acidulés (abricot, orange, lime) qui nous parviennent gorgés de soleil, dont l’origine est évidente, notre vocabulaire s’est empreint de l’arabe dans des domaines aussi variés que celui des mesures (avec entre autres carat, tare, quintal, calibre, algorithme) et des chiffres (on pense bien sûr à l’algèbre[1]), du mobilier et de la vaisselle (divan, tabouret, sofa, ottomane, tasse, timbale, carafe), de l’habillement (caban, coton, mohair, savate, jupe, gilet), de la musique (tambour, luth), etc.

Certains mots ont transité par l’Espagne ou l’Italie avant de s’installer chez nous: tare, de l’italien tara, lui-même de l’arabe tarha; mesquin, de l’italien meschino, de l’arabe miskin; carafe, de l’italien carrafa, lui-même emprunté à gharrafa, mot du Maghreb désignant un vase en terre cuite; la guittara morisca espagnole est issue de la kittara.

D’après le lexicologue Jean Pruvost[2], «l’arabe vient en troisième position après l’anglais et l’italien en quantité de termes intégrés au français». Les hommes ont toujours voyagé, les langues aussi, se mélangeant, s’enrichissant mutuellement. Ainsi se construit le monde.


[1] Abu Djafar Muhammad ibn Musa al Khwarizmi – Bagdad – Perse (780- 850) a créé la méthode al jabr. Son livre l’explicitant est traduit en latin au XIIe siècle et s’intitule Algebra.

[2] Jean Pruvost, Nos ancêtres les Arabes, ce que notre langue leur doit, Éditions JC Lattès